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Cour de justice - Page 4

  • La Cour de Justice des Communautés européennes se prononce pour l’accès du public à l’information sur la localisation des cultures d'OGM

    Dans un  arrêt du 17/02/2009, la Cour de Justice des Communautés européennes affirme le droit d’accès du public aux disséminations d’Organismes Génétiquement Modifiés, se ralliant ainsi à la solution qu’avait préconisée l’Avocat Général le 22/12/2008.

     

    La Cour juge qu’en vertu de la directive européenne 2001/18  relative à la dissémination volontaire d'organismes génétiquement modifiés dans l'environnement, le public intéressé peut demander la communication de toute information transmise par le notifiant dans le cadre du processus d’autorisation relatif à une telle dissémination. Les seules exceptions sont celles prévues par le texte (informations confidentielles notifiées à la Commission et à l’autorité compétente ou échangées au titre de la directive, informations susceptibles de nuire à une position concurrentielle, informations protégeant les droits de propriété intellectuelle). Dès lors, conclut la Cour, l’information relative au lieu de la dissémination ne saurait en aucun cas rester confidentielle et les Etats ne peuvent s’opposer à la divulgation du lieu de la dissémination d’OGM, au motif qu’elle pourrait troubler l’ordre public (raison invoquée par les autorités françaises pour justifier le refus de donner des informations permettant la localisation des cultures d’OGM). Ceci d’autant plus qu’il résulte de la directive elle-même que les données concernant l’évaluation des risques pour l’environnement ne doivent pas rester confidentielles.

     

    L’arrêt a été salué par les organisations de défense de l’environnement. Ainsi France Nature Environnement dont le Porte parole a déclaré : «Le Juge européen, en rappelant tout simplement le droit, brise le talon d'Achille de la stratégie des firmes OGM : l'opacité. Les marchands du vivant ne pourront plus prétendre que les OGM sont sans danger tout en cachant les lieux de culture. FNE entamera toutes les démarches nécessaires pour établir une carte de France précise de tous les champs d'OGM ». Greenpeace s’est réjoui en soulignant que « Ce pas vers une plus grande transparence est de bonne augure. Il n’est pas normal que les agriculteurs bio ou conventionnels soient pris en otage d’une technologie mal maîtrisée ! Maintenant, il faut aller plus loin : afin d’éviter tout risque de contamination, les essais ne devraient être autorisés que dans des espaces confinés ! »

     Domaguil

     

     

  • La Cour de Justice dit non à l’impunité des pollueurs des mers (Trois bonnes nouvelles en provaenance de l'UE,suite)

    Bonne fin d’année 2008 pour la commune de Mesquer, qui après avoir été victime de la pollution causée par le naufrage de l’Erika avait entamé un marathon judicaire contre Total (affréteur du navire) afin d’obtenir réparation et être remboursée des dépenses engagées pour faire face à cette pollution. A l’appui de sa demande elle invoquait l’article L.541-2 du code de l’environnement qui transpose en droit français la directive européenne du 15 juillet 1975 relative aux déchets et prévoit que toute personne qui produit ou détient des déchets dans des conditions de nature à porter atteinte à la santé de l'homme et à l'environnement est tenue d'en assurer ou d'en faire assurer l'élimination.

     

    En 2002, la cour d'appel de Rennes avait débouté la commune de Mesquer au motif que les sociétés du groupe Total mises en cause ne pouvaient être considérées, au sens de ce texte, comme productrices ou détentrices des déchets retrouvés sur les plages, dans la mesure où le produit pétrolier qu'elles avaient fabriqué n'était devenu déchet que par le fait du transport. Autrement dit, Total qui avait pourtant affrêté la cargaison de pétrole n’avait pas de lien avec celui-ci une fois le naufrage survenu.

     

    Parvenue devant la Cour de cassation l’affaire avait été renvoyée par cette dernière devant la Cour de justice des Communautés européennes pour interprétation des dispositions communautaires relatives à la notion de déchet entrant dans le champ d’application des dispositions de la directive de 1975, ainsi qu’aux notions de détenteur et de producteur, et des conditions générales de leur mise en cause. Et la CJCE avait, le 24/06/2008 fait une interprétation de ces dispositions favorable à la thèse de la commune de Mesquer : les boulettes d'hydrocarbures sont bien des déchets et ces déchets proviennent de la cargaison de l'affréteur, Total.

     

    La Cour de cassation en a tiré les conséquences dans son arrêt du 17/12/2008 . La troisième chambre civile a jugé que l'article L. 541-2 du code de l'environnement devait être interprété à la lumière des objectifs assignés aux Etats membres par la directive du 15 juillet 1975 telle qu’elle-même a été interprétée par la Cour de justice des communautés européennes. Dès lors, « la cour d'appel ne pouvait, sans violer le code de l'environnement, retenir que les sociétés du groupe Total n'étaient ni productrices ni détentrices des déchets retrouvés sur les plages tout en constatant qu'elles avaient, l'une, produit le fioul et, l'autre, l'avait acquis puis vendu et avait affrété le navire le transportant ».

     

     

    C’est à présent à la cour d'appel de renvoi (la cour d’appel de Bordeaux, en l’espèce) de déterminer si les sociétés Total, producteur et vendeur/affréteur ont contribué au risque de survenance de la pollution occasionnée par le naufrage.

     

     

    Le cabinet d'avocats de Corinne Lepage, qui représente la commune de Mesquer s’est félicité d’une décision qui en reconnaissant les affréteurs responsables de leur cargaison obligera les pétroliers à payer en cas de marée noire. Et ceci grâce à la voie ouverte par l’arrêt de la Cour de Justice des Communautés européennes.

     

    Ttrès bonne année 2009 aux habitants de Mesquer et à vous tous !

     

    Domaguil

  • Saisine de la Cour de justice des Communautés européennes dans l’affaire des quotas d’étudiants étrangers en Belgique

    J’avais relaté sur ce blog  comment la Belgique avait instauré des quotas d’étudiants pour arrêter l’ « invasion » de certaines de ses universités par des aspirants médecins, kinésithérapeutes ou vétérinaires en provenance de France notamment. Colère des laissés pour compte dont certains ont eu la bonne idée de se plaindre auprès de la justice de la discrimination dont ils feraient l’objet en invoquant les principes de non discrimination fondée sur la nationalité et de libre circulation garantis par le droit communautaire.

     

    L'affaire a été portée devant la Cour de Justice des Communautés Européennes qui a été saisie le 22/02/2008 d'une demande de décision préjudicielle par la Cour constitutionnelle de Belgique (aff.C-73/08, Nicolas Bressol e.a., Céline Chaverot e.a./ Gouvernement de la Communauté française).

     

    Les questions préjudicielles sur lesquelles la Cour devra statuer sont les suivantes:

    "Les articles 12, premier alinéa, et 18, paragraphe 1, du Traité instituant la Communauté européenne, lus en combinaison avec l'article 149, paragraphes 1 et 2, deuxième tiret, et avec l'article 150, paragraphe 2, troisième tiret, du même Traité doivent-ils être interprétés en ce sens que ces dispositions s'opposent à ce qu'une communauté autonome d'un État membre compétente pour l'enseignement supérieur, qui est confrontée à un afflux d'étudiants d'un État membre voisin dans plusieurs formations à caractère médical financées principalement par des deniers publics, à la suite d'une politique restrictive menée dans cet État voisin, prenne des mesures telles que celles inscrites dans le décret de la Communauté française, du 16 juin 2006, régulant le nombre d'étudiants dans certains cursus de premier cycle de l'enseignement supérieur, lorsque cette Communauté invoque des raisons valables pour affirmer que cette situation risque de peser excessivement sur les finances publiques et d'hypothéquer la qualité de l'enseignement dispensé ?

    En va-t-il autrement, pour répondre à la question mentionnée sub 1, si cette Communauté démontre que cette situation a pour effet que trop peu d'étudiants résidant dans cette Communauté obtiennent leur diplôme pour qu'il y ait durablement en suffisance du personnel médical qualifié afin de garantir la qualité du régime de santé publique au sein de cette Communauté ?

    En va-t-il autrement, pour répondre à la question mentionnée sub 1, si cette Communauté, compte tenu de l'article 149, premier alinéa, in fine, du Traité et de l'article 13.2, c), du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, qui contient une obligation de standstill, opte pour le maintien d'un accès large et démocratique à un enseignement supérieur de qualité pour la population de cette Communauté ?"   

    Domaguil
     
       

  • Arrêts Viking et Laval (2)

    Quelques jours plus tard, la Cour de Justice reprend les principes développés dans l’affaire Viking dans son arrêt sur le cas Laval ( CJCE, 18/12/2007 , aff. C-341/05 , Laval un Partneri Ltd / Svenska Byggnadsarbetareförbundet e.a.).

     

    Là encore, la solution a, à la fois, de quoi satisfaire et de quoi inquiéter les syndicats. Satisfaire, car la Cour de Justice des Communautés ne se limite pas à confirmer que le droit de mener une action collective est un droit fondamental « faisant partie intégrante des principes généraux du droit communautaire »  (considérant 91) mais rappelle, comme elle l’avait fait dans son arrêt du 11, qu’en vertu de l’article 3 du traité sur la Communauté européenne, « l’action de la Communauté comporte non seulement un marché intérieur caractérisé par l’abolition, entre États membres, des obstacles à la libre circulation des marchandises, des personnes, des services et des capitaux, mais également une politique dans le domaine social » (considérant 104). Dès lors que la Communauté a « non seulement une finalité économique mais également une finalité sociale », poursuit la Cour , « les droits résultant des dispositions du traité relatives à libre circulation des marchandises, des personnes, des services et des capitaux doivent être mis en balance avec les objectifs poursuivis par la politique sociale, parmi lesquels figurent, ainsi qu’il ressort de l’article 136 CE, notamment, l’amélioration des conditions de vie et de travail, permettant leur égalisation dans le progrès, une protection sociale adéquate et le dialogue social » (considérant 105). Tout comme elle l’avait fait dans son arrêt du 11, la Cour rappelle donc que « le droit de mener une action collective ayant pour but la protection des travailleurs de l’État d’accueil contre une éventuelle pratique de dumping social peut constituer une raison impérieuse d’intérêt général justifiant une restriction à l’une des libertés fondamentales garanties par le traité », en l’occurrence, la liberté de prestation de services (considérant 103). La Cour , enfin, légitime le blocus comme voie d’action collective en reconnaissant qu’il relève bien « de l’objectif de protection des travailleurs » (considérant 107). Ce faisant,  elle va plus loin que la jurisprudence française pour laquelle l’entrave à la liberté de travailler constitue une faute lourde.

     

     

    Mais l’application de ces principes généraux au cas d’espèce est moins favorable aux thèses des syndicats. En effet, la Cour juge que, dans l’affaire Laval, le blocus exercé n’était pas justifié, non pas parce qu’il ne répondait pas à l’objectif de protection des salariés, mais parce qu’il avait pour but de contraindre un prestataire de services étranger à adhérer à une convention collective sectorielle qui ne remplit pas les conditions prévues par la directive 96/71 sur le détachement de travailleurs  pour être opposable aux entreprises étrangères.

    Cette directive prévoit un ensemble de règles « impératives » de protection minimale que doivent respecter les employeurs qui détachent des salariés dans un Etat, dit pays d’accueil, en vue d’exécuter, à titre temporaire, une prestation dans cet Etat. Au nombre de ces règles figurent notamment, les taux de salaire minimal (article 3-1-c de la directive). L’article 3 de la directive dispose que ces règles sont fixées par « des dispositions législatives, réglementaires ou administratives et/ou par des conventions collectives ou sentences arbitrales déclarées d’application générale ». Le paragraphe 8 du même article précise ce qu’il faut entendre par conventions collectives d’application générale. Or, la convention collective suédoise à laquelle Laval était sommée de se conformer, ne remplit pas les conditions posées par ce paragraphe, juge la Cour. En Suède, la loi ne fixe pas de salaire minimal, laissant aux partenaires sociaux le soin de le déterminer dans les accords qu’ils passent. Mais les conventions collectives ne sont pas déclarées d’application générale. Cette difficulté aurait pu être levée si la Suède avait fait  usage de la possibilité laissée par la directive aux Etats de prendre pour base les conventions collectives ayant un effet général sur toutes les entreprises similaires appartenant au secteur concerné ou celles conclues par les organisations des partenaires sociaux les plus représentatives sur le plan national et qui sont appliquées sur l’ensemble du territoire. Mais elle ne l’a pas fait. Dès lors, la convention collective invoquée par les syndicats dans l’affaire Laval ne peut être prise en compte, d’autant, relève la Cour , que dans le secteur du bâtiment la négociation se fait au cas par cas, sur le lieu de travail, en tenant compte de la qualification et des fonctions des salariés concernés.

     

     

    Il en résulte pour l’entreprise prestataire une incertitude quant à l’étendue de ses obligations. Parce qu’elle s’inscrit  « dans un contexte national marqué par l’absence de dispositions, de quelque nature que ce soit, qui soient suffisamment précises et accessibles pour ne pas rendre, en pratique, impossible ou excessivement difficile la détermination, par une telle entreprise, des obligations qu’elle devrait respecter en termes de salaire minimal » (considérant 110), l’action du syndicat n’est donc pas de nature à justifier une restriction à la liberté de prestation de services.

     

     

    Il en aurait été autrement si la loi suédoise avait prévu un salaire minimal garanti ou si les conditions d’opposabilité des conventions collectives aux entreprises étrangères avaient été remplies.

    Les syndicats défendeurs ainsi que la CES se sont élevés contre ce qu’ils considèrent une interprétation trop étroite des dispositions de l’article 3 de la directive 96/71. De fait, il n’est pas inutile de rappeler que l’Avocat général avait adopté une position différente de celle  des juges dans ses conclusions. Celui-ci avait considéré que les syndicats peuvent, par des actions collectives contraindre un prestataire de services d’un autre état membre à souscrire à un taux de salaire prévu par une convention collective, même si celle-ci n’a pas été déclarée d’application générale, dans la mesure où elle est applicable de fait aux entreprises nationales du même secteur d’activités se trouvant dans une situation similaire. La Cour a donc choisi une conception plus restrictive, sur la base d’un raisonnement qui peut très bien se comprendre. Il est donc faux de conclure de ce cas d’espèce, comme on a pu le lire que la Cour « légitime le dumping social ».

     

     

    En réalité, les arrêts Viking et Laval  confortent, on l’a vu,  le droit syndical au niveau européen, mais le second met à mal le modèle suédois de négociation salariale.

    Domaguil